Les écoles primaires en 1900

Pour présenter l’enseignement primaire à l’exposition universelle de 1900, le Ministère de l’Instruction publique a demandé à chaque instituteur de France de rédiger une monographie sur sa commune (instruction ministérielle du 29 décembre 1898).

Chaque monographie devait comprendre en première partie un plan de la commune (ils sont en ligne sur ma page « cartes et plans d’Yveline »), et sa description géographique et historique. La seconde partie devait présenter l’histoire de l’école, et faire un état des lieux en 1899, avec un  plan des locaux scolaires.

L’objectif de cette grande enquête était de célébrer le progrès de l’instruction publique et l’efficacité des instituteurs dans l’enseignement de l’histoire et de la géographie, facteur indispensable pour renforcer, au sein de la population française, l’unité nationale, l’attachement à la patrie et l’esprit républicain.

Rappel :
En 1900, l’école est organisée par la loi Ferry (16 juin 1881) et par celle du 28

une classe des Bréviaires 1898

mars 1882. Elle est obligatoire pour tous les enfants de 6 à 13 ans révolus, et elle est gratuite. Elle se veut laïque, pour lutter contre l’influence de l’Eglise catholique. Elle doit préparer les futurs citoyens, désormais tous électeurs et futurs soldats, dans la perspective de la revanche contre les Prussiens.
La création d’une Caisse pour la construction des écoles, en 1878, a permis aux communes qui manquaient de moyens de réaliser nombre d’investissements nécessaires.
Naturellement ceci ne signifie pas que toutes les écoles disposent en 1900 de moyens suffisants, et les monographies des instituteurs contiennent souvent des plaintes ou des sollicitations assez directes.

Les instituteurs semblent avoir eu toute liberté pour rédiger leur document, mais ils savaient que celui-ci serait lu par leur hiérarchie, par les responsables de la commune, et sans doute même, rendu publique. Sans doute cela en a-t-il conduits à une certaine réserve.
Cependant beaucoup ne se privent pas de revendications qui concernent plus souvent leur propre rémunération que l’équipement de leur école.

Je vous propose ici la seule présentation des plans des écoles, et les seules citations relatives aux locaux et à leur équipement : elles nous offrent un inventaire intéressant de la situation de l’école primaire publique de 1899.

Je n’évoque pas ici Rambouillet, à qui j’ai déjà consacré un article complet.

Faisons le tour des écoles

Auffargis

Auffargis :

La classe est fréquentée par une moyenne de 66 enfants. « En 1895 les tableaux de bois ont été remplacés par des tableaux ardoisés à deux faces, tournant sur des gonds. Les tables de classe ont été remplacées par des tables d’un nouveau modèle, approprié aux tailles des enfants. Elles ont 5 places, la largeur de la classe ne permettant pas les rangées nécessaires entre des tables à 2 places. »

Saint-Benoit

Saint-Benoit, dont les enfants étaient autrefois scolarisés à Auffargis, dispose de sa propre école depuis 1883 avec 40 à 50 élèves.

«  La commune a fait construire un local, lequel est pourvu de tous les perfectionnement, l’hygiène et la salubrité pour les maîtres et pour les élèves. L’instituteur doit en prendre possession le 1er octobre 1899 »

Bonnelles

Bonnelles

Depuis 1842 la commune a ses propres locaux. L’école est mixte et reçoit environ 30 élèves

« Aujourd’hui l’école est repeinte, elle possède deux grandes cartes murales, deux tableaux noirs et cette année elle aura une pendule qui lui fait encore défaut. Des réparations ont aussi été faites au logement de l’instituteur et une pompe a été posée au puits du jardin. Les tables de l’école laissent à désirer et demandent à être remplacées par d’autres d’un modèle plus perfectionné. Ce sera pour un peu plus tard. »

Cernay

Cernay-la-Ville

un effectif moyen de 120 élèves est réparti en 2 écoles.

Une école de filles est construite en 1886, pour laisser aux garçons (et à la mairie) les bâtiments construits en 1867.

Clairefontaines

Clairefontaine-en-Yvelines

Ce plan indique l’état des lieux depuis une restauration entreprise en 1867, qui comprenait notamment la construction d’une tourelle pour sortir du bâtiment la cage d’escalier. « La salle de classe carrée de 5,75m sur 3,22 de hauteur est trop juste pour les 26 élèves. C’est avec peine que nous avons pu placer le nouveau mobilier ». L’instituteur souhaite donc la construction d’une nouvelle salle de classe, pour le bien-être de ses élèves… et surtout pour récupérer ainsi 2 chambres supplémentaires pour ses 3 enfants.

 Dampierre

Il s’agit ici d’une école religieuse, due à la générosité du duc de Luynes, avant d’être laïcisée.

L’école actuelle « est sur un plan convenable et élégant ». De nouvelles tables ont été financées (comme la construction) par le duc de Luynes qui a ensuite fait don de l’école à la commune.

L’instituteur consacre sa monographie à lui rendre un hommage appuyé, sans doute pas totalement désintéressé.

Gazeran

Gazeran

En 1867 la commune a acheté un bâtiment pour y transférer l’école de filles, et conserver l’ancien bâtiment à usage de mairie et d’école de garçons, en le faisant bénéficier en 1891 d’une importante restauration.
« La salle de classe est spacieuse. Les deux écoles sont meublées de tables de 2 places pouvant accueillir chacune 60 élèves. L’école possède une armoire fermant à clef et contenant 3 compartiments pour la bibliothèque et la collection des produits de la localité. »

 Hermeray

Hermeray

En 1887 la commune a construit une nouvelle mairie-école à Bechereau. « Les classes sont saines, vastes; bien aérées et bien éclairées. Chaque salle est faite pour 60 enfants et en reçoit en moyenne un maximum de 50. Le matériel scolaire est ancien mais en assez bon état. »

 La Boissière-Ecole

La Boissière-Ecole

C’est le salaire de l’instituteur qui lui soucie plus que le matériel de classe : « Confions-nous en la sollicitude de la République qui voudra bien faire davantage encore qu’elle n’a fait pour les meilleurs de ses serviteurs pour ceux qui travaillent à la régénération du pays, à l’avenir de la France » …

Le Perray-en-Yvelines

Le Perray-en-Yvelines

Un nouveau groupe scolaire a été construit en 1884 et en 1898 une classe maternelle a été ouverte pour décharger l’école.
« L’école possède un appareil à projections –un appareil Vermorel– des appareils de physique et des produits chimiques, des cartes géographiques, trois carabines système Hubert pour le tir (!), des livres scolaires donnés ou plutôt prêtés à tous les élèves, un buste de la république placé dans l’école de garçons et des tableaux géographiques. Le mobilier scolaire est suffisant et en bon état ».

Les Breviaires

Les Bréviaires

« La salle de classes est toujours dans le presbytère depuis 1848. Elle est suffisamment grande pour le nombre actuel des élèves (32). Elle sert encore de mairie, le conseil municipal ayant toujours reculé devant la dépense qu’occasionnerait la construction d’une école et d’une mairie. Le mobilier non seulement est incomplet mais défectueux. Les tables sont d’un modèle ancien construites sans aucun souci de l’âge et de la tenue des enfants. »

Les Essarts-le-Roi

Les Essarts-le-Roi

« L’école de garçons, devenue trop étroite pour contenir tous les élèves, a été agrandie en 1898, un préau couvert a été construit et une partie du mobilier scolaire renouvelé. La salle de classe est maintenant proportionnée au nombre d’élèves qui peuvent y entrer, la cour de récréation plantée de tilleuls est satisfaisante sous tous les rapports.
L’école de filles ne remonte qu’à 1881. La construction en est régulière et élégante, il est regrettable que la cour des jeux qui est un peu étroite ne soit pas placée derrière l’école. Le mobilier scolaire est ancien »

Les mesnuls

Les Mesnuls

En 1859 l’école s’est installée dans de nouveaux locaux. « Cependant en 1874 la salle de l’école, qui était mixte fut divisée en deux par une cloison. Mais l’exigüité, l’insalubrité et la proximité gênante de ces deux salles exigeaient la translation de l’école de filles dans un autre local.(…)
Au commencement de 1880 on bâtit donc la nouvelle école de filles »

Orcemont

 Orcemont

« En 1855 la commune a fait l’acquisition de l’ancien presbytère. Cette maison a eu bien des changements à subir à l’intérieur pour l’appropriation d’une école »

Orphin

Orphin

« Les écoles sont pourvues d’un matériel scolaire suffisant : les tables chez les filles sont neuves mais sans dossier; chez les garçons c’est l’ancien mobilier, aussi sont-elles vieilles, usées et vermoulues en partie.

Le matériel d’enseignement se complète d’année en année. La classe de garçons a reçu en 1897 un appareil à projection lumineuse, payé par trois généreux donateurs et en 1898 un compendium scientifique »

Poigny-la-Forêt

Poigny-la-Forêt

« La situation physique et morale de l’école est satisfaisante et l’installation matérielle ne laisse que peu à désirer eu égard toutefois à la population de la commune.

L’instituteur est livré à lui-même car ceux qui pourraient l‘aider –ils sont peu nombreux– se livrent entièrement à des pratiques sacrées, et les autres, occupés de leurs intérêts matériels les plus immédiats n’ont ni les loisirs ni les moyens de se consacrer à des oeuvres qu’ils sont impuissants à faire prospérer. »

Rocherfort-en-Yveline

Rochefort-en-Yvelines

« le groupe scolaire est agréablement situé, bien aéré  et à l’abri de tout mouvement qui pourrait incommoder les maîtres et distraire les élèves. L’installation matérielle ne laisse rien à désirer. Les deux classes sont pourvues chacune de 24 tables à 2 places. Le matériel d’enseignement est complet ».

 Saint Hilarion

Saint-Hilarion

« L’école est entourée de murs. Devant, la cour de récréation. Derrière, une partie réservée au maître. La classe est très spacieuse. La superficie est plus que suffisante pour les 22 élèves qui la fréquentent. Le mobilier est assez complet. Il n’existe pas de préau couvert. »

 Saint-Leger-en-Yvelines

Saint-Léger-en-Yvelines

« Les bâtiments dans lesquels se trouvent l’école des filles (42) et celle des garçons (53) avaient été construits lors des chasses royales et servaient de chenil. Une fontaine sise dans le jardin de l’institutrice s’appelle encore la fontaine aux chiens  »

La comparaison de ces plans montre qu’une majorité d’écoles partagent les locaux de la mairie, selon un modèle architectural que nous connaissons bien, et qui reste pour nous le symbole de l’école publique française. Sauf exception, le logement de l’instituteur est toujours très imbriqué dans les locaux scolaires.

musée de l’école Chartres

Et, bien que peu d’instituteurs aient jugé utile de les décrire, sans doute retrouvait-on dans toutes les classes le même équipement : des tables plus ou moins modernes (les plus récentes, de plusieurs tailles pour s’adapter à la morphologie des élèves), des tableaux noirs et des cartes géographiques au mur, une armoire contenant une petite bibliothèque, et des objets permettant d’illustrer les leçons de choses

Plus tard les cartes murales et les livres ne suffiront plus à intéresser les enfants. Freinet introduira l’imprimerie à l’école. Plus près de nous un grand plan numérique dotera les élèves d’ordinateurs et tablettes, et aujourd’hui les instituteurs utilisent des outils numériques baptisés TIC (technologies de l’information et de la communication).

Un TIC ? Autrefois ce mot désignait un « Geste, attitude, comportement plus ou moins ridicule par sa répétition ». Il ne faut peut-être pas en abuser !

Christian Rouet
septembre 2023

Cet article a 3 commentaires

  1. PUGIN Sophie

    Il serait intéressant de comparer les plans avec ceux avec l’enquête de 1884

  2. Zannier Annie

    Déçue de ne pas trouver l’histoire de l’école de Raizeux ! En 2010 nous avons fêté, en grande pompe le centenaire de notre Mairie-Ecole, costumés à la mode de l’époque : Discours, exposition, conférence concernant les premiers bâtiments qu’elle avait occupés, sa construction ainsi que la carrière d’Eugène Bucher, directeur à l’époque. Le tout à l’aide de documents issus des Archives des Yvelines et de la mairie de Raizeux. Dommage !

    1. christian Rouet

      Comme vous l’avez vu je n’ai raconté ici aucune histoire d’école : j’ai publié seulement les informations (plans et commentaires sur les equipements) contenus dans les monographies des instituteurs. Or il se trouve qu’il n’y en a pas eu de rédigée pour Raiseux.

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