Acheter son logement

Quoi de plus important que l’achat de sa résidence ? Il nous faut trouver le bien d’exception qui correspond à la fois à nos besoins, nos envies, et nos moyens financiers.

Interviennent en amont ou en aval de notre achat, outre toutes les professions du bâtiment, des notaires, des géomètres, des agents immobiliers, des experts en diagnostic, des architectes, des décorateurs, des professionnels de la finance…
Sans oublier les assureurs qui garantissent le sérieux de tous ces professionnels, avant de nous garantir la pérennité de notre achat. Et tous les fonctionnaires ou agents publics qui interviennent pour la tenue du cadastre, des hypothèques, des permis de construire…

Dans ce domaine, nous avons vécu une évolution fantastique dont internet n’a été qu’un outil. Revenons sur quelques-uns des acteurs du marché immobilier de Rambouillet.

l’Annonciateur du 8 juillet 1830

Le cadastre

Le bornage d’un terrain est défini dans le code civil de 1804 resté, sur ce point, inchangé depuis Napoléon.
Au préalable, les limites d’un terrain étaient déterminées par des repères (un arbre, une haie, une rivière) dont l’existence était transmise par voie orale, et pouvait être confirmée par des témoins. Dans son traité de bornage (vers 1400), Boysset recommande d’amener un jeune enfant sur les lieux, de lui faire mémoriser les limites, après quoi « le jeune garçon reçoit une gifle fortement assénée pour que le souvenir cuisant marque mieux encore dans sa mémoire tout ce à quoi il vient d’assister ». On se demande pourquoi cette méthode a été abandonnée !

Des géomètres professionnels assermentés, recueillant tous indices disponibles pouvaient mettre en place des bornes, notamment dans le cas de litiges entre riverains. C’est ainsi que les différends entre le Chapitre de Chartres et la famille de Prunelé de Gazeran a doté la forêt de Rambouillet d’un ensemble exceptionnel de bornes.

borne aux armes des Prunelé de Gazeran

L’établissement d’un cadastre, avec le souci premier de pouvoir imposer chacun de façon équitable a été envisagé dès Charles VIII, mais ne sera effectif que sous l’Empire. Aujourd’hui c’est un cadastre numérique, consultable gratuitement qui est en ligne ici, et peut être consulté par tous. Y sont représentées chaque parcelle, avec le relevé précis des bâtiments et terrains nus. Toute déclaration de travaux signalée par un propriétaire y est immédiatement transcrite, de même que les données contenues dans les actes de vente.

Le notaire

En 1539, l’ordonnance de Villers-Cotterêt impose que les actes soient rédigés en Français, qu’ils soient conservés et qu’un répertoire permette de les retrouver aisément. La profession de notaire prend alors de l’importance. La Révolution, puis Napoléon accroissent leur rôle. Ils assurent également l’ensemble des prêts entre leurs clients.

Rambouillet a eu deux études notariales concurrentes, au moins depuis 1900. Elle en compte quatre aujourd’hui.

Simon Neveu, (vers 1580) semble être le plus ancien notaire dont on trouve les actes aux Archives Départementales.

Me Georges Barbier

Me Georges Barbier, « un gars du Nord », reprend en 1953 l’étude de Me Poupard, 35ème notaire à avoir succédé à Me Neveu. Notaire de la Ville, conseiller discret et avisé de Mme Thôme Patenotre, il est pendant 35 ans de tous les projets d’urbanisme, et fait de son étude la plus importante de Rambouillet.

Il traverse la révolution de la photocopieuse (la Rank Xerox, sur papier ordinaire !) et celle du traitement de texte informatique, qui font disparaître les pools de dactylos. L’immeuble qu’il avait fait construire au 12 rue Gautherin pour son étude devient alors trop grand et ses successeurs l’abandonneront pour s’installer dans son ancienne maison d’habitation, au n°8.

Lorsqu’il prend sa retraite, en 1988, l’étude, trop importante pour un seul notaire, est rachetée par une société civile composée de trois associés. Leur SCP est devenue aujourd’hui la SAS Bernard Belle-Croix, Yann Bridoux, François-Marie Belle-Croix, Amélie Franc et Henry Belle-Croix, notaires associés.

un ancien garage devient étude de notaire

Me Aritzia qui exerce en même temps que Me Barbier, est installé, après guerre, au 6 rue Chasles. Son successeur, Me Ecalard, transfère son étude 31 rue Sadi-Carnot. Puis Me Beaune réussit une très belle restructuration immobilière, dans un ancien garage, au 9 rue Sadi-Carnot, en face de la gare. C’est là que travaille aujourd’hui la SCP Virginie Heringer Rameaux et Marie Christine Rivayrand Blanc.

La « loi Macron » de 2015 ayant changé les conditions d’accès à la profession, et d’implantation de nouvelles études, Rambouillet en a aujourd’hui deux autres : celle d’Emmanuelle Hillairet au 2 rue Félix Lorin (la Villeneuve) et celle de Stéphanie Pessina au 6 de la place Jeanne d’Arc.

Il y a également des notaires au Perray, à Montfort, Les Essarts, Saint-Arnoult, Epernon, Rochefort, Ablis et le-Mesnil-Saint-Denis.

Les actes sont aujourd’hui signés de façon électronique, et transmis avec les documents obligatoires dont la liste ne cesse de s’allonger, sur clef USB !

Les agents immobiliers

Ils existaient déjà dans l’empire romain, sous le nom de « proxénète ». Mais naturellement, le terme, qui désignait la mise en relation, n’avait pas sa connotation actuelle !

Au début du XXème siècle le notaire reste le principal acteur du marché immobilier (par ailleurs encore très limité). On voit apparaître des « agents de location ». Ils  sont rares à Rambouillet, et ont généralement une activité principale : géomètre, architecte… Ils sont 3 en 1910, 6 en 1935.

1910 : architecte, expert et agent immobilier

En 1954 ce sont des « agences immobilières ». Il y en a 7 à Rambouillet, dont 5 exercent cette seule activité.

En 1980, on trouve l’agence Gobillon, spécialisée dans les propriétés de standing, la Gerbe d’Or Immobilier d’Azzopardi qui propose également ses constructions, l’Agence Bleue, l’Agence de la Clairière, l’Agence Primevère, l’Agence de la Gare, l’Agence Charon, celle de Jean Vitoux, et la plus importante : l’agence Desmeuzes, qui commercialise notamment les promotions les plus importantes.

A cette époque les prix de l’immobilier augmentent rapidement, chaque année. Les locations disponibles sont rares et chères.

Dans les années 2000, utilisant les ressources d’internet, on voit apparaître également des réseaux de mandataires immobiliers, qui travaillent depuis chez eux.

Dans l’annuaire de décembre 2023 on trouve ainsi à Rambouillet 10 mandataires et 29 agences (en fait, dans cette liste, plusieurs ont déjà fermé). Lorsque le marché se tend, c’est la gestion des locations qui assure aux agences qui offrent ce service, la couverture de leurs frais de fonctionnement. Les autres souffrent…

Le site « Leboncoin », utilisé gratuitement par de nombreux particuliers, et, moyennant finances, par tous les professionnels, recense au 15 décembre 2023, 636 logements à vendre (dont seulement 7 annonces de particuliers) et 43 locations disponibles à Rambouillet.

Les besoins du marché

Rambouillet –comme tant d’autres communes– est depuis longtemps confronté aux limites du foncier disponible. Le territoire de la forêt est heureusement protégé. Plus question de conquérir des terres agricoles avoisinantes… Les terrains sont donc rares … et chers. Les primo-accédants en sont les premières victimes, et notamment les jeunes.

Cette situation n’est pas nouvelle. Déjà, le 10 décembre 1905, prenant la parole au Banquet du Syndicat des Entrepreneurs de Bâtiment de Rambouillet, le maire Marie Roux les exhortait à construire davantage, et à des prix plus bas, notamment afin d’attirer une clientèle de villégiature : « Ne pourriez-vous entreprendre de ces constructions, dites légères, comme on en voit tant aux environs de Paris, tout à la fois confortables, d’un aspect agréable et d’un loyer modeste ? »

Le Progrès 12 déc 1905

Il faut attendre les années 1970, avec la création de la Clairière pour que le marché de l’immobilier se détende vraiment, mais il se heurte à nouveau aujourd’hui à l’absence de foncier constructible.

Accessoirement (?) l’obligation d’atteindre aujourd’hui un quota de logements sociaux supérieur à l’existant pose de gros problèmes à la ville : son non-respect a un coût qui ne cesse d’augmenter et grève le budget communal.

Les ventes du château

En marge de ces quelques réflexions, je voudrais rappeler que le château de Rambouillet a lui-même fait l’objet, dans son histoire, de 4 ventes.

– Le 6 mai 1368, Jeanne de Brucourt et son époux Girart de Tournebu cèdent leur domaine de Rambouillet à Jean Bernier. L’acte de vente décrit « un hébergement et manoir », situé dans un terrain marécageux, en bordure de la commune de Gazeran. Comment une telle vente avait-elle été conclue ? Nous n’avons aucune indication.

– En 1699, à la mort de Marie-Julie de Sainte-Maure, duchesse d’Uzès, fille du duc de Montausier et de Julie d’Angennes, ses héritiers ne peuvent assumer les charges de son domaine de Rambouillet. Tous ses biens sont hypothéqués et leur gestion confiée à des syndics.
Fleuriau d’Armenonville est naturellement bien placé pour connaître les soucis financiers de la succession d’Uzès et pour se porter acquéreur du domaine de Rambouillet puisqu’il est l’un des principaux créanciers du duc d’Uzès. Outre l’intérêt sincère que d’Armenonville porte à ce chateau (il l’achète 140 000 livres, et y fait 500 000 livres de travaux en sept ans !), cette acquisition est donc pour lui une façon efficace de récupérer sa créance.

– Louis XIV aime chasser dans la forêt de Rambouillet, et l’idée d’y disposer d’un relais de chasse le tente fort. Cependant il a déjà dépensé plus que de raison dans la construction de Versailles et de Marly, et la France supporte depuis 5 ans le coût de la guerre de succession d’Espagne.

En 1706, renonçant donc à acheter lui-même le domaine de Rambouillet, il oblige d’Armenonville à le céder à son fils illégitime, le comte de Toulouse, l’un des personnages les plus fortunés du royaume.
D’Armenonville reçoit 500 000 livres complétées par la capitainerie du Bois de Boulogne, ce qui lui assure également la jouissance du château de Madrid résidence royale construite pour Henri II dans le Bois, mais délaissée par le roi dès l’achèvement de Versailles.

Compte tenu des travaux qu’il avait financés à Rambouillet, il est difficile de dire si l’opération a été financièrement avantageuse pour d’Armenonville, mais il est clair qu’elle profita à sa carrière.

– A son tour, en 1783, Louis XVI oblige le duc de Penthièvre à lui céder son château. Le roi se montre particulièrement généreux puisque la vente se fait au prix considérable de 16 000 000 livres (environ 180 millions d’euros!). Le duc obtient accessoirement le droit de retirer du château quelques meubles, des éléments de décoration, et fait extraire de la crypte de l’église les neuf tombeaux de sa famille pour les transférer dans la Collégiale Saint-Pierre de Dreux.

Voici donc quatre ventes qui auraient fait la fortune d’un agent immobilier, s’il s’en était trouvé un pour les organiser !

Après la Révolution, le château est mis en vente par adjudication à plusieurs reprises, mais ne  trouve pas d’acquéreur.

Quelques paradoxes de l’immobilier

On voit rarement un propriétaire analyser avec lucidité son achat immobilier !

Si le vendeur en demandait un juste prix, cela signifie pourtant que l’acquéreur, en acceptant de payer en sus la commission d’un intermédiaire, et les frais et droits d’acte et d’enregistrement, trouve normal de le surpayer d’environ 10%… en ayant l’impression de faire une bonne affaire !

Et lorsqu’il emprunte sur la durée la plus longue, il reste convaincu que son prêt est financièrement rentable pour lui… ce qui implique qu’il ne l’est pas pour la banque qui lui prête.

Comment expliquer de tels raisonnements ? Dans bien des régions, et notamment la nôtre, c’est d’abord parce que la rareté des offres conduit depuis plus de 50 ans à des hausses substantielles. L’idée que les nouvelles exigences, en matière d’isolation notamment, vont modifier une évolution à laquelle nous étions si bien habitués, est difficile à intégrer.

Pourtant , dans bien des régions de France, des successions sont aujourd’hui refusées parce que leur actif immobilier est une charge et non une opportunité.

Mais la raison principale est probablement qu’un achat immobilier a une telle importance pour notre qualité de vie, que nous avons besoin de nous en réjouir sans réserves.

Et sans doute est-ce bien ainsi.

L’I.A.

Quittons un instant le passé. Le développement de l’intelligence artificielle nous laisse entrevoir bien des progrès, dans ce domaine comme dans tant d’autres.

Demain (?) un programme qui saura tout de nos goûts et de nos désirs sans avoir même à nous questionner saura nous proposer des offres parfaitement adaptées à nos attentes.

Des logiciels 3D de réalité virtuelle nous permettront de visiter à distance de façon plus approfondie qu’en venant sur place.

Nous aurons immédiatement accès à un diagnostic immobilier. Des programmes nous indiqueront tous les aménagements possibles, avec simulation, plans, devis, établissement des dossiers administratifs nécessaires… Les logiciels de décoration d’intérieur pourront intégrer tous les éléments de notre mobilier actuel, ou nous faire toute proposition de changement.

Et naturellement, notre besoin de financement sera étudié par une banque capable d’évaluer notre véritable capacité de remboursement, puisque ayant une parfaite connaissance de nos dépenses courantes…

Acheter le logement de notre choix va donc devenir de plus en plus facile.

Pour autant, on peut imaginer qu’aucun métier de l’immobilier ne disparaîtra. A la création d’internet, nous avions pensé que les agents immobiliers étaient condamnés, puisque la mise en ligne de photos, de plans et la possibilité d’un contact direct semblait permettre d’économiser leur commission. Ils n’ont jamais été aussi nombreux !

Christian Rouet
décembre 2023

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