Grenonvilliers
Grenonvilliers (Guernonvilliers, ou Garnonvilliers ) a été longtemps un hameau et un fief indépendants de Rambouillet. Il en constitue aujourd’hui l’un des quartiers importants.
Revenons ici sur son histoire.
Le fief
Nous n’avons pas d’indication quant à ses limites précises. Il est bordé au nord par le rû qui descend de l’étang du Moulinet pour rejoindre l’étang de Groussay, et au sud par le rû Jouanne, qui lui est parallèle, mais ses limites est et ouest sont incertaines. Sans doute la Grange-Colombe et le Pâtis en ont-ils même fait partie à certaines époques.
Le suffixe « villiers », dérivé du latin « villare » (domaine rural, ferme ) traduit bien son origine agricole. S’agit-il, à une lointaine époque, de la ferme des Grenon ?
Grenonvilliers est mentionné en 1230 dans le scriptum feodorum Monteforti, établi à la demande du comte de Montfort Amaury V (le fils du fameux Simon de Montfort). On y lit, dans ce document, qu’un Guillaume de Mehendebout est vassal de Guy de Foignard, seigneur de Guernonvilliers. Et ce dernier est lui-même vassal d’Epernon, pour ce fief, et donc des Montfort.
En 1317 le fief de Grenonvilliers revient à Jeanne de Dreux, épouse de Jean IV, comte de Roussy.
En 1391, Regnault d’Angennes, acquiert le domaine de Rambouillet et l’agrandit de divers fiefs voisins, dont celui de Grenonvilliers.
A la suite de divers partages successoraux, le fief passe à Jacques II d’Angennes, seigneur de Poigny, et reste dans cette branche de la famille d’Angennes jusqu’en 1706. Il est alors acheté par le comte de Toulouse, nouveau seigneur de Rambouillet.
Et le fief disparaît, lorsqu’en 1783 Louis XVI l’achète, en même temps que le château de Rambouillet, et l’intègre alors dans son domaine.
Le hameau
Il se développe entre les rues Pasteur, Georges Pequin et l’avenue de Paris, et de façon plus diffuse le long de la rue Louis Leblanc (Louis Le Blanc est un ancien adjoint au maire, conseiller d’arrondissement qui habitait ce quartier).
Ses limites, comme le tracé de ses rues, changent au cours des siècles. En superposant le nom des rues actuelles sur le plan de 1731, dressé par J.Blécon (conférence Savre) nous pouvons en avoir une petite idée :
Il est relié à Rambouillet, au sud, par le chemin du moulin à Grenonvilliers, qui devient rue de Grenonvilliers, puis rue Pasteur en 1923, et par le chemin de Rambouillet à Grenonvilliers, qui devient rue de l’Eglise à Grenonvilliers, puis rue du Maréchal Foch en 1929.
Nous savons qu’au 16ème siècle le hameau se composait de 30 maisons, 12 granges et 5 étables. Au XVIIème siècle on y recense 21 maisons, 1 grange et 1 ferme. Au XVIIIème siècle 14 maisons, 1 grange et 6 fermes.
Nous n’avons pas d’indication précise quant au nombre d’habitants, toutefois un état de 1763 dénombre 22 foyers ce qui correspondrait à près de 100 personnes de tous âges. Rappelons qu’à cette époque Rambouillet en comptait environ 1500.
Le caractère agricole du hameau est évident, renforcé par la présence de plusieurs mares publiques qui servent également de vivier.
Dès le XVIIIème siècle Grenonvilliers dispose aussi de deux fermes-auberges : « Notre Dame de la fontaine » et la ferme des « Trois pigeons ».
Au XIXème et XXème siècles le hameau se développe dans toutes les directions, et notamment vers le sud, opérant la jonction avec Rambouillet par l’urbanisation des rues Pasteur et Foch.
En 1885, huit fermes locales exercent leur activité agricole, et notamment maraichères et alimentent le marché de Rambouillet. L’annuaire de 1914 en mentionne encore 4 : les fermes Bardou, Deschamps, Hardouin et Pequin.
Aujourd’hui n’en subsiste plus qu’une, celle de Didier Clinard, dite la ferme de Grenonvilliers, à l’angle de la rue Louis Leblanc et de l’avenue de Paris.
C’est une grande ferme à cour fermée, désignée comme « petite ferme et métairie » dans une description de 1732.
Vers 1830, les augmentations de rendement avaient conduit le fermier Pequin à la doter de hangars modernes pour accroitre sa capacité de stockage . Il exploitait alors environ 20ha répartis autour de la ville.
En 1908 la ville installe à l’entrée de la rue Louis Leblanc un octroi afin de décharger celui du Pont-Hardi, dans le café de Lenormand.
On relève alors un peu d’activité non agricole dans le quartier : une blanchisseuse, les débits de boisson de Mme Lamielle et de Lenormand, la fabrique Taquet de rince-bouteilles, l’entreprise de Travaux publics de Plard et le vidangeur Bourlier.
Au XXème siècle, et surtout après la seconde guerre, le quartier se développe rapidement. La dernière mare est asséchée en 1932 ce qui permet un alignement de la rue Louis Leblanc.
Il semble que l’appellation de Grenonvilliers ne soit plus utilisée que pour la partie Est du quartier, à partir de l’avenue de Paris.
Le café Lenormand, ancien octroi, devenu un café-restaurant (aujourd’hui « Clap de faim ») où se réunissent tous les passionnés de PMU, en marque l’entrée. Plus loin, dans la rue Louis Leblanc, le café associatif « le Court bouillon » propose son espace culturel aussi original que convivial.
Le quartier a acquis une vocation professionnelle, commencée avec l’installation de la Radiotechnique, en 1954, et demain (?), la construction d’un nouvel hôpital va profondément le transformer.
Autour, à partir d’un habitat social (loi Loucheur), s’est développé un urbanisme pavillonnaire.
En 1962, la ville a construit 60 logements sociaux. Complétés en 1982 par trois ensembles de 70 logements, ils ont été réhabilités en 1994 et 1995.
Ces immeubles marquent la limite nord de Rambouillet. Ils sont la partie visible de la ville, depuis la RN10, et les Rambolitains ont été nombreux à regretter que cette première vue ne soit pas plus flatteuse, avant que les arbres ne viennent dissimuler ces résidences !
Dès les années 1900, à une époque où les fêtes locales se multiplient, Grenonvilliers a la sienne, qui a lieu en mai, le jour de l’Ascension. Défilé, déjeuner, épreuves sportives, concert… Sous une tente, installée à cette occasion, on danse le soir, et le bal reste en place jusqu’à la Fête de la Saint-Jean pour le grand plaisir des habitants du quartier, mais aussi des Rambolitains, et même des touristes parisiens.
Le quartier, bien qu’intégré dans Rambouillet, tient à conserver sa personnalité. C’est ainsi qu’il commémore ses morts de 14-18 par la pose de sa propre plaque, en complément du monument aux morts de la commune.
Après une interruption durant la première guerre mondiale, la fête reprend, avec sa foraine, ses chevaux de bois, ses tirs… En 1934 le feu de la Saint-Jean y est allumé et béni par l’archiprêtre.
La fête a-t-elle été abandonnée à l’époque de la seconde guerre mondiale, sans reprendre à la Libération ? Je ne suis pas catégorique quant à la durée de son interruption, mais en tous cas, depuis 1977, elle a lieu de nouveau chaque année, et les habitants du quartier y sont très attachés.
Christian Rouet
décembre 2023
Un plaisir de lecture toujours renouvelé !